Peut-on juger une enfant criminelle de 11 ans de la même manière qu’un adulte ? Voilà la question que pose ce livre.
En 1968, Mary Bell, 11 ans, est arrêtée, jugée et condamnée pour le meurtre de deux petits garçons âgés de 3 et 4 ans. Ces deux assassinats et le procès qui va suivre déclenchent un déferlement de haine de la part de la population, comme des médias, envers la jeune fille.
La journaliste Gitta Sereny couvre le procès. Une question la hante alors : comment peut-on juger cette enfant comme un adulte devant une cours d’assise, en public, sans se demander ce qui a pu l’amener à commettre ces crimes affreux ?
Mary Bell sera condamnée à perpétuité. Elle effectuera la première partie de sa peine dans un centre pour adolescent puis, à partir de 16 ans, elle sera envoyée en prison. Elle sera libérée en conditionnelle à 23 ans, sans avoir jamais bénéficié d’un suivi psychologique.
Gitta Sereny écrit un premier livre en 1972 sur cette affaire, Meurtrière à 11 ans – Le cas de Mary Bell, où elle rapporte les éléments de l’affaire et recueille les témoignages de l’entourage de la jeune fille.
Une si jolie petite fille est un livre d’entretiens qu’a eus la journaliste avec Mary Bell, alors âgée de 40 ans. Cette dernière accepte de parler après la mort de sa mère dont elle a subi l’emprise toxique durant toute sa vie. Elle raconte avec difficulté son enfance chaotique, maltraitée par une mère prostituée et un beau-père délinquant, et le procès, ses années dans un centre pour adolescent, la prison et la libération. Elle ne se livre jamais tout à fait, mélangeant le vrai et le faux. La journaliste parle également à son entourage, anciens gardiens, membres de la famille, officiers de probations…. afin de vérifier les dires, recouper les informations et connaitre l’état psychologique de Mary Bell aux différentes étapes de sa vie.
Ce livre, sorti en 1998 en Angleterre, est une critique du système judiciaire anglais qui considère un enfant pénalement responsable à partir de 10 ans, sans jamais se poser la question de la responsabilité de son entourage, ni tenter de comprendre comment l’enfant a pu en arriver à tuer. Le suivi psychologique de l’enfant est quasi inexistant.
La sortie de ce livre a fait scandale en Angleterre car, même après tant d’années, Mary Bell reste l’enfant meurtrier, « le monstre », comme elle était surnommée. De nombreuses personnes, dont un ministre, se sont élevées contre la parution de ce livre, reprochant à Mary Bell d’avoir reçu de l’argent en échange de son témoignage.
Ceci pose la question de la rédemption. A-t-on le droit à une seconde chance après avoir payé sa dette à la société ? Mary Bell n’a rien fait de répréhensible depuis sa sortie de prison. Elle vit en couple et élève parfaitement sa petite fille. Malgré cela, 30 ans après les faits, elle est forcée de vivre sous une fausse identité et reste l’une des personnes les plus haïes d’Angleterre pour les crimes qu’elle a commis à l’âge de 11 ans.
Par son tact et sa psychologie, Gitta Sereny amène cette femme à parler des meurtres qu’elle a toujours chercher à occulter, à oublier. Elle arrive peu à peu à la mettre face à ses responsabilités. Jamais elle n’excuse Mary Bell ni ne remet en question l’horreur de ses crimes. Son but est uniquement de comprendre et dénoncer.
Édith, 25/03/2016
Excellent , édifiant et bouleversant documentaire qui se lit comme un roman.
On souhaite que ce soit uniquement un roman et non la réalité…
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