America, T.C. Boyle

america-t-c-boyle-liseuses-de-bordeauxAmerica de T.C. Boyle, sorti en 1995, est un grand roman intemporel et universel. Il traite des nantis et des pauvres, de leur éternelle opposition dans une cohabitation toute relative. De ce thème « classique », T.C. Boyle tire un récit implacable, redoutable et dérangeant.

Delanay et Candido auraient pu ne jamais se rencontrer, bien que vivant à Los Angeles et plutôt près l’un de l’autre. Le premier, bourgeois bon teint, vit dans un quartier huppé, fermé et sécurisé, et se présente comme humaniste et tolérant. Le second, immigré clandestin mexicain, campe au fond d’un canyon non loin de la maison du premier ; il survit, l’espoir chevillé au corps qu’un jour il vivra son rêve américain. Malgré leur proximité, Delanay et Candido ne pouvaient se rencontrer que par accident, les frontières mentales entre ces deux mondes étant presque plus imperméables que les frontières physiques. Et T.C. Boyle de créer cet accident : Delanay renverse Candido avec sa voiture (forcément, on est à Los Angeles…)

Alors commence la satire de T.C. Boyle. Delanay le bourgeois, bien qu’amoureux de la nature et des grands espaces vit presque reclus dans un entre soi ne tolérant aucune rencontre qu’il n’ait pas décidée, pas même lorsqu’il s’agit d’un coyote. Chaque intrusion est vécue comme une agression, agression qui décuple sa peur jusqu’à frôler la paranoïa. Candido, quant à lui, est de plus en plus pauvre, l’étau du système se refermant inéluctablement sur lui. La grande force de T.C. Boyle est de ne jamais tomber dans le cliché. Son récit est implacable.

T.C. Boyle démontre comment un homme qui se veut progressiste perd pied et bon sens dès qu’il se sent menacé, au point d’en oublier ses principes humanistes. En n’énonçant que des faits, rien que des faits, et sans prendre parti, il distille la défiance et la peur avec une justesse effrayante, jusqu’à la chute inévitablement effroyable. Le récit est redoutable.

Et le lecteur, in fine, de se demander si les grands idéaux peuvent exister face à la peur… Dérangeant.

America est un roman que l’on peut lire à tout moment de sa vie, plusieurs fois, même si l’on n’est pas américain…

Florence, 05/08/2015

Une réflexion sur “America, T.C. Boyle

  1. Bravo florence pour ce commentaire juste et concis qui m’a donné envie de relire ce roman découvert dans les années quatre-vingt. MF

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