Juste la lumière de Pascale Dewambrechies dresse le portrait d’une femme face à son destin. Croqueuse d’hommes, libre et indépendante : voici Eva avant qu’elle ne rencontre Dimitri. Lui est son « double masculin ». Metteur en scène, cultivé, libre : il est l’homme de sa vie. Elle l’aime passionnément au point d’être débordée par cette passion dont elle ne sait que faire et semble se ranger à ses côtés. Sa relation fusionnelle avec Dimitri est d’ailleurs sa faille : elle se laisse mener par cet homme narcissique et alcoolique qui la pousse au bout d’elle-même.
Elle va jusqu’à le suivre en Roumanie lorsque celui-ci s’y voit offrir une opportunité professionnelle. En fait, elle le suit autant qu’elle fuit la France car elle est habitée par le sentiment qu’un secret plane sur sa famille et ne se sent bien que loin d’elle. Mais en Roumanie, la maladie surgit, la prend en défaut. Eva se sent rattrapée par son destin et son sentiment d’incapacité à maîtriser sa vie refait surface par le prisme de l’enfance. Pour Eva, un événement fondateur datant d’avant sa naissance a scellé cette incapacité à disposer de sa vie, s’est immiscé dans son enfance et la poursuit à l’âge adulte. Elle ressent l’existence d’un secret, sans arriver à le nommer. Juste la lumière est le récit de sa quête pour comprendre le sens de sa vie.
Eva est une femme moderne, hors normes. Enfant, son acuité lui permet de comprendre les non-dits qui planent sur sa famille. Adulte, elle reste à part, posant un regard différent sur le monde. Sa solitude n’en est que plus grande. D’ailleurs, la solitude d’Eva est immense, comme l’était celle de Gilda, l’héroïne de l’Effacement, le précédent roman de Pascale Dewambrechies. Les deux romans se font écho. Si Gilda se laisse mourir de chagrin, Eva, elle, choisit de vivre : « J’ai fait un diptyque, sans le savoir. Les personnages de mes deux romans se répondent. Mais ce n’était pas intentionnel ! ».
Pascale Dewambrechies décrit avec beaucoup de justesse les barrières intimes de la vie des femmes. Avec Juste la lumière, elle raconte la résilience face à la maladie, aux mensonges et aux échecs de la vie. « Les libertés sont difficiles à conquérir, elles s’inscrivent dans l’intime, dans les corps des femmes ». Et pour approcher cet intime au plus près, l’auteure utilise le tutoiement comme procédé narratif. Les flash-backs éclairent le récit de la vie d’Eva, les plans sont serrés sur le personnage principal. L’écriture presque cinématographique dévoile l’intime avec pudeur et tendresse.
Le récit est construit autour de quelques moments clés de la vie d’Eva : Dimitri, l’amant ; l’enfance, dans un pays qu’Eva nomme Ailleurs ; la Maladie (avec une majuscule) ; et enfin la vérité. L’auteure va à l’essentiel en quelques mots dans un style sobre et juste : « Je veux être un écrivain minimaliste. Ce qui m’intéresse, ce sont les blancs entre les mots ».
Avec Juste la lumière, Pascale Dewambrechies signe un second portrait de femme juste et tendre. Et même si l’histoire d’amour avec Dimitri n’est qu’un prétexte pour parler d’Eva et de sa quête de vérité, ce roman fixe le combat d’une femme pour comprendre sa vie. Pour se comprendre.
Florence, 15 mars 2017