Tous les ingrédients du romantisme sont réunis dans Sarah Thornhill de Kate Grenville : l’Australie du 19ème siècle est sauvage, indomptée et peuplée d’Aborigènes à la culture si différente et incomprise; les colons anglais sont rudes, d’anciens bannis qui se construisent un avenir par la force ; la belle-mère est acariâtre et autoritaire et prête à tout pour se hisser un peu plus haut sur l’échelle sociale avec l’approbation du père qui tente de faire oublier ses origines peu reluisantes; la jeune fille, c’est Sarah, qui se construit en tant que femme dans cet univers rugueux, découvre la passion avec Jack à l’adolescence et la tendresse avec John Daunt, l’amour adulte plus raisonnable donc …
Le récit est narré par Sarah, illettrée, ce qui donne force et vivacité à l’histoire. Jamais sentimentale, Sarah va de l’avant avec indépendance. C’est une battante à l’esprit avisé à laquelle le lecteur s’attache facilement.
Le regard de Sarah, naïf alors qu’elle n’est qu’une enfant, interrogateur à l’adolescence, puis plus mature et lucide, permet à Kate Grenville de faire découvrir au lecteur les facettes d’un pays en construction. Avec justesse, elle décrit les rapports violents et poreux des colons blancs avec les Aborigènes et l’évolution des règles sociétales avec l’arrivée d’anglo-saxons qui ne sont pas des bannis et qui importent un modèle de société plus contraint, plus hiérarchisé. Ce procédé permet à l’auteur de laisser suffisamment de place à son personnage principal pour dérouler son histoire personnelle en même temps que l’intrigue.
Le récit est rythmé et le lecteur est emporté dans le flot de la vie de Sarah. Et c’est peut-être ce que je reproche à ce roman : certains épisodes semblent précipités, il leur aurait fallu un peu plus de temps pour permettre d’approfondir l’histoire et la psychologie de l’héroïne. J’aurais aimé en savoir plus sur ce frère aîné, en butte à son père qui vit dans un méandre reculé du fleuve et sur l’histoire tragique de la fille métisse que son autre frère, Will, a eu avec une Aborigène. Le voyage final en Nouvelle-Zélande, initiatique et révélateur de la Sarah adulte, aurait mérité plus de développement.
Sarah Thornhill est un personnage passionnant, fort et déterminé et j’ai dévoré son histoire…même si j’aurais aimé avoir plus d’information parfois. L’Australie décrite par Kate Grenville est majestueuse, intrigante aussi… et comme ce roman est le dernier de la trilogie commencée avec Le Lieutenant je suis bien tentée de continuer ma plongée au cœur de l’Australie en lisant à rebours…
Florence, 27/08/2014
Pour sûr, ce roman mérite d’être lu et mieux connu. Il pose des questions essentielles comme le poids du passé dans la construction d’un individu. Et Sarah, quel personnage !
J’aimeJ’aime
J’avoue avoir pensé, en voyant cette couverture surannée : tiens, un roman à l’eau de rose. Eh non ! C’est un roman très profond sur l’identité et l’héritage familial, sur la fidélité à soi (à ses propres valeurs) et aux autres. Je le conseille vivement.
J’aimeJ’aime