Madelaine avant l’aube, de Sandrine Collette

L’univers très particulier des romans de Sandrine Collette est une des raisons de son succès. Dans Madelaine avant l’aube, comme dans beaucoup d’autres, il n’y a pas d’espace temporel ni de lieu identifiable. Son schéma d’écriture correspond au conte, comme elle nous l’expliquera au salon du livre de Saint-Malo Étonnants Voyageurs. L’autrice ne dit jamais où se situe l’action ni quand. Elle souhaite que cela reste universel. Dans le domaine du conte, on utilise des archétypes. Et c’est ce qui lui plaît. Tout n’est pas donné.

Dans « Madelaine avant l’aube » Sandrine Collette créée une fiction dans un entre deux, laissant le lecteur deviner qui est le narrateur ou en jouant avec l’identité de certains personnages du roman.

Ce que j’ai trouvé de pertinent dans ce roman, c’est la progression vers le drame. L’autrice met en place petit à petit, les éléments de compréhension de sa dramaturgie. On découvre un monde paysan qui subit la rudesse du travail de la terre, leur soumission aux maîtres, mais également des moments de famine dans ce hameau abritant deux sœurs jumelles et leurs familles. S’ajoute à cela, la peur constante pour les femmes, d’être agressées par le fils du maître. Le décor est ainsi planté lorsque Madelaine fait son apparition dans le roman. Cette enfant sauvage a dû survivre dans la forêt pour rester en vie. Il y a quelque chose d’animal chez elle. Madelaine n’a pas appris à apprivoiser la haine et la fureur qu’elle a en elle, face à tout ce qu’on fait subir à ces paysans qui vont l’accueillir dans leur famille.

Quelles sont les limites de cette enfant ? Madelaine a cet âge où l’on croit que tout est possible.

Sandrine Collette a cet art d’écrire avec des non-dits. Elle utilise notamment des phrases inachevées. Il est beaucoup question de regards entre ses personnages. Dans ses romans, on voit plus qu’on ne parle. Il y a des silences qui en disent long. Je suis admirative de cette écriture où l’absence de mots, de descriptions, peut provoquer une telle gamme d’émotions.

Babeth, juillet 2025

Madelaine avant l’aube, Sandrine Collette, JC Lattès 2024

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