Fuir l’Eden, d’Olivier Dorchamps

Fuir l’Eden : c’est ce que cherche à faire Adam. Dans cette banlieue de Londres, loin des beaux quartiers, il vit avec sa sœur Lauren et « l’autre ». C’est ainsi qu’il nomme son père. La violence et la méchanceté de l’autre, lui donnent un caractère inhumain. Pour tenir le coup dans cette cité, Adam peut compter sur ses amis : Pav le polonais et Ben, d’origine somalienne. Ils ont grandi ensemble, se protégeant mutuellement de la drogue et des embrouilles du quartier. Pour se faire un peu d’argent, Adam va faire la lecture à Claire, une vieille irlandaise aveugle. Elle va, peu à peu, devenir un pilier de sa vie. Et puis il y a cette jeune fille qu’il va croiser sur le quai de Clapham Junction. Eva est belle et lui rappelle sa mère. Il tombe amoureux et va alors se mettre en quête de la retrouver. Cette rencontre va le conduire vers un monde auquel il n’appartient pas. En se rapprochant d’Eva, tous les souvenirs d’une mère partie en les abandonnant remontent à la surface. Adam a inventé un passé à sa sœur pour lui fabriquer des souvenirs heureux. Il ferait n’importe quoi pour Lauren. Mais il est loin d’imaginer ce qu’elle sait réellement.

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Le duel des grands-mères, de Diadé Dembélé

Hamet va à l’école laïque de langue française de Bamako. Autour de lui, tout le monde parle soninké, bambara, peul et bien d’autres langues locales. Il y est inscrit pour faire honneur à son père, qui travaille en France, et qui n’a pas pu étudier cette langue. C’est un garçon intelligent qui rentre de l’école frustré de ne pas être à la hauteur. Il aime le français, mais il n’aime pas la façon dont on le lui enseigne. Alors il va faire l’école buissonnière.

La vendeuse de froufrou pense que je vais en classe, le boutiquier pense que je vais en classe, M’ma pense que je vais en classe, donc on est d’accord que je vais en classe.

Lorsque la fourberie est découverte, ses parents décident de l’envoyer au village de sa famille pour lui apprendre la vie. En arrivant chez sa grand mère, il parle en bambara, la langue de son cœur, ce qui est offensant pour les villageois qui comprennent le soninké. Ici c’est la savane, il y a des « méchants » et des « bêtes sauvages ».

Ces jours m’effraient. Ce vent m’agresse. Les cris des animaux m’agacent. Ce village me répugne.

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La plus précieuse des marchandises, de Jean-Claude Grumberg

Voilà la seule chose qui mérite d’exister dans les histoires comme dans la vraie vie. L’amour, l’amour offert aux enfants, aux siens comme à ceux des autres. L’amour qui fait que malgré tout ce qui existe, et tout ce qui n’existe pas, l’amour qui fait que la vie continue.

Voilà un récit aussi noir que lumineux. Un tout petit livre que vous lirez d’un seul élan, avec une émotion intense. Il méritera sans doute une deuxième lecture. Jean-Claude Grumberg nous offre une histoire dans une écriture entre conte et mythe.
« Il était une fois dans un grand bois une pauvre bucheronne et un pauvre bucheron »… La faim était constante, en ces temps de guerre mondiale. Sous son manteau de neige, la nature glacée était elle-même prise de désolation. Quelques trains traversaient les champs vers des lieux dont on ne revenait pas… Vous avez compris… C’est l’histoire de l’horreur, d’un tabou et de toutes les hontes : celles de perdre le sentiment d’apparentement humain. Mais aussi celle d’un enfant, des mains pour penser et sauver la vie, et de la richesse au-delà de toutes les misères.
Ce récit est simplement magnifique…   

Laetitia, le 14 février 2022

La plus précieuse des marchandises, Jean Claude Grumberg, éditions du Seuil, 2019 

Grégoire Delacourt : de l’expression d’une colère à l’enfant réparé

Grégoire Delacourt est arrivé ce samedi matin au salon Lire en poche de Gradignan avec humour et légèreté. Comme un enfant qui lance une blague pour détendre l’atmosphère, cet homme qui ne fait pas son âge nous présentait ses deux derniers romans.

Un jour viendra couleur d’orange est le 9e roman de l’auteur. Ce titre, tiré d’un poème de Louis Aragon, est plein de promesses : « Un jour viendra couleur d’orange, un jour d’épaule nue où les gens s’aimeront ». La toile de fond du roman, ce sont les gilets jaunes. Grégoire Delacourt voulait essayer de comprendre ce mouvement en colère, car pour lui, on a tous des colères enfouies.

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