La saga des Cazalet, pourquoi un tel engouement ?

Telle est la question qui nécessairement se pose, même si la forme de précédent créé par la série anglaise Downton Abbey constitue peut-être un début de réponse. Mais le parti pris de cette impression de lecture n’est pas du tout de faire un parallèle entre les deux, bien que la saga des Cazalet se déroule dans l’époque immédiatement postérieure, à partir de 1937, et que la psychologie des personnages était, de mémoire, également très détaillée dans cette autre fresque familiale.


Pourquoi, donc ? O combien de réponses possibles à cette question et, me concernant, la réponse « parce que c’est une saga » n’est pas la bonne non plus car je n’en lis que rarement et n’en suis vraiment pas particulièrement à la recherche.
Curieusement peut-être, la première réponse qui me vient est « parce qu’on entre et qu’on s’intéresse à la psychologie des enfants dès le début« . Cet aspect est notable car il est tout de même assez rare de voir des personnages évoluer de l’enfance à l’âge adulte et quand je dis « évoluer », il faut préciser « évoluer de l’intérieur » car Elizabeth Jane Howard alterne en permanence récit général de ce qui arrive à cette famille et incursions dans les pensées de la plupart de ses membres. C’est sans doute ce qui fait que l’on s’intéresse dès le début à chacun des personnages avec acuité, y compris à ceux des enfants tout à la fois voués à leurs propres vies d’enfants et à la contemplation de celles des adultes.

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Fuir l’Eden, d’Olivier Dorchamps

Fuir l’Eden : c’est ce que cherche à faire Adam. Dans cette banlieue de Londres, loin des beaux quartiers, il vit avec sa sœur Lauren et « l’autre ». C’est ainsi qu’il nomme son père. La violence et la méchanceté de l’autre, lui donnent un caractère inhumain. Pour tenir le coup dans cette cité, Adam peut compter sur ses amis : Pav le polonais et Ben, d’origine somalienne. Ils ont grandi ensemble, se protégeant mutuellement de la drogue et des embrouilles du quartier. Pour se faire un peu d’argent, Adam va faire la lecture à Claire, une vieille irlandaise aveugle. Elle va, peu à peu, devenir un pilier de sa vie. Et puis il y a cette jeune fille qu’il va croiser sur le quai de Clapham Junction. Eva est belle et lui rappelle sa mère. Il tombe amoureux et va alors se mettre en quête de la retrouver. Cette rencontre va le conduire vers un monde auquel il n’appartient pas. En se rapprochant d’Eva, tous les souvenirs d’une mère partie en les abandonnant remontent à la surface. Adam a inventé un passé à sa sœur pour lui fabriquer des souvenirs heureux. Il ferait n’importe quoi pour Lauren. Mais il est loin d’imaginer ce qu’elle sait réellement.

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Elmet de Fiona Mozley

L’histoire

Daniel vit dans une maison construite dans les bois du Yorkshire, avec son père et sa sœur ainée, sur les terres d’un propriétaire sans scrupules, Mr Price.
En harmonie avec la nature qui les entoure, la famille mène une vie marginale. La mère est partie et le père fait subsister les siens grâce aux combats qu’il gagne, pour de l’argent, à la force de ses poings. Sous la protection de leur père, les enfants grandissent, s’accommodant de ses absences et de ses silences. Un lien profond unit ces trois êtres, fait d’amour, de respect et de confiance.

Tout bascule le jour où Mr Price les menace d’expulsion. En réaction, le père organise un mouvement de résistance, ralliant à sa cause les travailleurs et les locataires de la région, eux aussi opprimés par les propriétaires. Une mécanique dramatique se met alors en mouvement…

Ce qui nous plaît

Le choix narratif. Dans Elmet, l’auteur réussit à faire naître chez le lecteur un sentiment d’empathie pour le père et ses enfants. Le fait de choisir pour narrateur le jeune Daniel y est sans doute pour quelque chose : racontée d’une voix candide et fragile, la violence qui s’installe n’en est que plus intolérable.

Le père. Mi-Captain Fantastic, mi-Robin des Bois, le personnage du père est magnifique.

«  Malgré toute sa brutalité, papa aimait les gens. Il avait pour eux l’affection d’un chasseur pour ses proies. Il les aimait profondément, sincèrement, mais avec distance. Il avait peu d’amis, il ne les voyait pas souvent, mais les gens qu’il aimait, il les choyait comme de vieux souvenirs. Et il se souciait d’eux. »

Le style. L’écriture de Fiona Mozlay, même lorsque la tension est dramatique, sait se faire délicate. A la manière des impressionnistes, l’auteure signe un roman tout en finesse où les silences et les non-dits ont toute leur place. On remarquera donc une attention pour le lecteur qui n’est pas « téléguidé » : à lui de trouver ses propres réponses, à lui d’imaginer, en marge, un développement au récit.

L’habileté. L’auteure évite l’écueil d’un roman manichéen opposant les riches et méchants propriétaires aux gentils locataires honnêtes. Le récit est bien plus complexe et l’intrigue bien plus difficile à dénouer.

Un récit universel. Située au 20ème siècle en Angleterre, cette histoire pourrait très bien avoir lieu à une autre époque, à un autre endroit. La portée universelle de ce conte est évidente : Fiona Mozley nous raconte une histoire de combat, d’espoir et de fraternité.

Un premier roman abouti.

Marisa, 6 janvier 2020

Le complexe d’Eden Bellwether

Le 28 août est paru aux éditions Zulma le premier roman d’un jeune auteur britannique, Benjamin Wood, écrivain à la carrière prometteuse. Marisa l’a dévoré pour vous…   En rentrant chez lui un soir à Cambridge, Oscar Lowe ne se doute pas de l’événement bouleversant qu’il s’apprête à vivre. Lorsqu’il passe devant la chapelle de King’s College où […]