La Réole deviendra-t-elle la prochaine ville du livre et des arts ? L’implantation de Technè bookshop depuis un an dans cette commune va dans ce sens. C’est la troisième librairie spécialisée qui vient compléter les divers choix déjà en place (généraliste avec La folie en tête et un bouquiniste bordelais qui a deux boutiques à la Réole, La nuit des Rois) et sûrement pas la dernière… On y trouve principalement des ouvrages dédiés à l’architecture, à l’art et à l’artisanat.
En plus de cette librairie en ville, Technè est une plateforme numérique qui permet la vente en ligne et présente des contenus éditoriaux (dont des podcasts et des entretiens réalisés avec des architectes, des artisans et des artistes). Le but étant de diffuser, promouvoir et sensibiliser à la culture du bâti, aux savoir-faire et au patrimoine par les livres et l’édition.

J’ai rencontré Flora Bonnemé qui est à l’origine de ce concept très riche. Après avoir été architecte pendant dix ans, elle a travaillé à la librairie du centre Beaubourg à Paris avant de venir réaliser ce rêve dans notre région. La Réole est une ville qui bouge, avec de nombreux acteurs dynamiques autour du secteur de la culture. Flora a donc fait le pari de se lancer dans une petite commune prête à développer ce domaine. Elle m’a dit avoir orienté ses achats pour la librairie vers les livres iconiques pour les étudiants et les architectes, les livres importants dans ce domaine, les thématiques auxquelles elle était sensible.
Deux exemples de livres iconiques pour Flora et aussi à destination du grand public :
LES PIERRES SAUVAGES, DE FERNAND POUILLON
Ce roman se présente comme le journal d’un maître d’œuvre qui, au 12e siècle, édifia en Provence l’abbaye du Thoronet, exemple d’architecture cistercienne. Jour après jour, nous voyons ce moine constructeur aux prises avec la faiblesse des hommes et l’inertie des choses, harcelé par les éléments contraires, et plus encore, par ses propres contradictions. Il décrit la vie d’un chantier médiéval, les problèmes techniques, financiers ou doctrinaux que posait sa bonne marche, les solutions d’une étonnante modernité qui leur furent données. Cet ouvrage est aussi une réflexion passionnée sur les rapports du beau et du nécessaire, de l’ordre humain et de l’ordre naturel et de l’architecture.
CE QUE SAIT LA MAIN : LA CULTURE DE L’ARTISANAT, DE RICHARD SENNETT
Ce livre volumineux de 400 pages ravira les lecteurs d’essais. Richard Sennett y propose une définition de l’artisanat beaucoup plus large que celle de « travail manuel spécialisé », et soutient que le programmateur informatique, l’artiste, et même le simple parent ou le citoyen font œuvre d’artisans. Il nous fait voyager à travers le temps et l’espace, des tailleurs de pierre de la Rome antique aux orfèvres de la Renaissance, des presses du Paris des Lumières aux fabriques de Londres et met en valeur le savoir-faire de l’artisan, cœur, source et moteur d’une société où primeraient l’intérêt général et la coopération. Et tandis que l’histoire a dressé à tort des frontières entre la tête et la main, la pratique et la théorie, l’artisan et l’artiste, et que notre société souffre de cet héritage, Richard Sennett prouve que « Faire, c’est penser ».

Quel est le public de cette librairie ?
Des curieux, des gens qui veulent faire des travaux, qui sont sensibles à la construction. Cela peut être aussi des touristes en promenade, ou des locaux qui veulent acheter un beau livre pour eux ou pour offrir.
Ce fut un plaisir de discuter avec Flora, jeune femme à la fois pétillante et sensible qui pourra, soyez en sûr, vous donner de bons conseils en architecture.
Babeth, le 12 septembre 2022