Le club des enfants perdus de Rebecca Lighieri

Je déteste lire des pavés, ça me fatigue à l’avance. Mais je craque dès que je vois certains noms d’auteurs. C’est le cas de Rebecca Lighieri. Je savoure son écriture, et j’aime les sujets auxquels elle est attachée.

C’est par le regard d’Armand que s’ouvre ce roman. Comédien reconnu, cet être narcissique a une conscience aiguë de ce qu’il est, de ce qu’il vaut et de ce qui importe dans sa vie. Néanmoins, comme il le dit :

J’étais bien parti pour être un connard

Non conformiste, il aime d’autres femmes que la sienne tout en considérant que Birke, son épouse reste le centre de sa vie. Comédienne également, elle l’a tiré vers l’excellence. Pourtant ce n’était pas gagné pour cette femme sublime et déterminée. Née dans une famille dysfonctionnelle, avec des parents toxicos et violents, elle dissimule des secrets honteux. Pour Armand, sa femme est une rescapée. Leur fille Miranda, âgée d’une vingtaine d’années, n’a rien en commun avec ses parents. Elle est dépressive, petite, fragile et sans éclat. Enfin, c’est ainsi qu’ils la voient. Armand voue un amour infini à sa fille et il aimerait sincèrement qu’elle soit heureuse. Malgré toute leur compassion, les parents de Miranda la trouvent désespérément lisse. Il faut dire que Birke n’était pas faite pour être mère et elle entretient très peu de relations avec sa fille. Miranda, quant à elle, se considère comme une bouffonne paumée.

Face à mes parents, je me suis toujours sentie comme un insecte englué dans une toile, ou comme un oiseau affolé par trop de phares

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La Petite Bonne de Bérénice Pichat

La Petite Bonne, ce titre m’a fait de l’œil dès que je l’ai aperçu. 

Parmi la profusion de sorties littéraires en ce mois de septembre, c’est celui-ci que j’ai choisi. J’aime les histoires qui parlent des femmes, des strates qui les composent, et que l’auteur a plaisir à effeuiller pour en faire des écrits vibrants et infinis. J’aime encore plus quand il s’agit de femmes de rien, d’aspect ordinaire. Elles ont le pouvoir de révéler tous leurs potentiels dans leurs vulnérabilités et leurs insuffisances.

Dans ce roman écrit par Bérénice Pichat, la petite bonne qui n’a pas de prénom et sera toujours présentée comme telle, va chez le couple Daniel s’occuper de l’entretien de leur demeure bourgeoise. Monsieur, autrefois pianiste émérite est un grand mutilé de la 1ère guerre mondiale. Sa femme, Alexandrine, veille sur lui depuis plus de 20 ans, vivant dans l’ombre de cet homme ravagé par la solitude et la souffrance. Et si Monsieur profitait de l’arrivée de cette jeune bonne pour l’aider à réaliser son funeste projet ?

 Elle est assise

Face à lui

Ses entrailles la brûlent

Elle sent ses joues rouges

Sa peau qui tire

Elle réfléchit

Elle a très bien compris

Ce que Monsieur lui demande

Il a parlé clairement

Joué cartes sur table

La vérité apparaît

Toute simple

Dans son horreur

Face à elle

Il attend

Crispé

Tendu

Et si elle acceptait 

Il veut y croire

Peut- être est-ce possible 

Notre petite bonne va, contre toute attente, s’imposer dans leurs vies et bousculer leur fragile équilibre. Sa fraîcheur, son authenticité et ses blessures vont trouver un écho auprès de ce bout d’homme brisé. Ce récit puissant sous forme de huit clos, donne une voix singulière à chaque personnage. Bérénice Pichat donne à la petite bonne, une narration unique sous forme de vers libres donnant ainsi plus de corps à ces mots.

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