Interview avec Pierre Raufast

Le cerbère blanc, de Pierre Raufast

Auteur atypique, Pierre Raufast se distingue par ses romans qui se lisent comme des contes modernes. Il se fait connaître en 2014 avec La fractale des raviolis aux éditions Alma et sort cette semaine son cinquième roman, Le cerbère blanc.
A cette occasion, nous avons voulu en savoir un peu plus sur cet auteur plein d’humour.

En lisant vos romans, je suis impressionnée par les explications scientifiques qui se mélangent à des notes d’humour. D’où vous vient ce goût pour les sciences ?
Je suis ingénieur de formation et je travaille dans la cyber-sécurité. (Ce qui a d’ailleurs donné Habemus Piratam, un roman qui concilie mes deux passions : littérature et cyber-sécurité !). J’ai toujours aimé les sciences pour ce mélange de rigueur, de poésie et de créativité qu’elles sous-tendent. Loin d’être barbantes, j’ai toujours considéré les mathématiques comme le summum de la créativité.

Quelle est la place de l’écriture dans votre vie ? L’écriture est une vraie passion depuis quelques années. Elle est nécessaire pour me recentrer, me ressourcer et assouvir mes besoins de créativité et de création. Elle est par ailleurs très complémentaire avec la lecture.

Quels sont les auteurs qui vous ont donné envie d’écrire ? Qui vous font rire ? 
J’ai été beaucoup inspiré par les auteurs sud-américains : le réalisme magique de Gabriel García Márquez (Cent ans de solitude), Mario Vargas Llosa (Tours et détours de la vilaine fille) ou Jorge Amado (Le vieux marin), sans parler de Jorge Luis Borges que je cite dans La variante chilienne.

Qui est Carlos Jose-Miguel Pilar-Pilar Gonzalez de Benitez, que vous citez dans plusieurs romans ?
CJMPPGdB est un personnage fictif. C’est une forme de running-gag dans tous mes romans quand je veux parler d’un ouvrage de référence. De même que la vallée de Chantebrie n’existe pas mais est un lieu imposé, ce monsieur l’est aussi.

Il y a également un animal que l’on retrouve assez souvent …Quelle est l’origine de votre obsession pour les rats-taupes ?
Je n’ai pas d’obsession pour les rats-taupes ! Dans La fractale des raviolis, ils jouent pourtant un rôle central qui m’a beaucoup amusé à écrire. Longtemps quand je dédicaçais ce livre, je dessinais un rat-taupe. Du coup, dans les autres romans, j’en glisse un de-ci, de-là, comme une marque de fabrique.

Les titres de vos romans sont toujours intriguants (La Variante chilienne, La Baleine thébaïde…) Comment faites-vous le choix des titres de vos romans ?
Le choix du titre fait l’objet d’une séance de brainstorming avec la maison d’édition : un titre doit raconter l’histoire, être inédit, original et susciter la curiosité ! C’est un vrai challenge … mais très amusant.

Votre tout nouveau roman Le cerbère blanc sort aux éditions Stock le 4 mars. Pouvez-vous nous en parler ?
Choyé par les siens, Mathieu vit une enfance idyllique dans la vallée de Chantebrie. Mais tout bascule le jour où il perd ses parents dans un accident tragique. C’est décidé, il consacrera sa vie à défier la mort. Il quitte sa vallée et Amandine, sa fiancée, pour suivre des études de médecine à Paris. Là, il travaillera pour un taxidermiste dont la plus belle pièce est un mystérieux cerbère blanc…
Mais peut-on vraiment oublier son passé ?
Tiraillé par ses démons, ses regrets et son ambition, Mathieu ira d’aventure en aventure jusqu’à ce lieu ultime, interdit, duquel il reviendra transformé.

Le cerbère blanc est il dans la même veine que vos précédents romans ? Y a-t-il des rats-taupes ?!
Non. J’ai essayé de construire un roman plus profond avec une histoire principale bien marquée (pas de pseudo-nouvelles comme les autres). On y parle aussi de sujets de fond ; la mort, l’amour, le pardon.
… mais chez le taxidermiste, il doit bien traîner un ou deux rats-taupes empaillés ! 😉

Propos recueillis par Babeth, 4 mars 2020

Pourquoi écrire ? de Philip Roth

Résumer en quelques mots cette compilation me paraît impossible. Je vais devoir faire des choix, je ne pourrais pas tout vous dire : vous serez obligés de lire Pourquoi écrire ? 

Pourquoi écrire ? par Philip Roth

Pour ceux qui ne le connaissent pas, Philip Roth est né en 1933 et a grandi dans la communauté juive de Newark. Auteur de 31 livres, il a cessé d’écrire en 2012 et est décédé le 22 mai 2018. Il fait partie de cette génération exceptionnelle d’écrivains d’après-guerre qui ont fait de la littérature américaine ce qu’elle est depuis presque un demi-siècle.

Ce livre nous permet d’entendre la voix de Roth sur sa propre écriture : « Jour après jour pendant cinquante ans, j’ai fait face à la page suivante, sans défense et sans préparation. Pour moi écrire était un acte d’autopréservation. » Il nous parle de ses personnages : « Mon intention n’est pas de présenter les hommes de mes romans comme ils devraient être mais comme les êtres insatisfaits qu’ils sont. », ou du langage dans l’écriture : « Je suis porté vers une prose qui a les tours, les accents, les cadences, la spontanéité et la souplesse de la langue parlée et qui est en même temps bien campée sur la page, tempérée par l’ironie, la précision et l’ambiguïté que l’on trouve dans la littérature de facture traditionnelle ».

Dans ses romans, il cherche à approfondir des questions sur la vie, la sexualité, l’écriture, la vieillesse et la mort. Il fut souvent critiqué pour son rapport au judaïsme. Dans une lettre ouverte à Wikipédia, où nous retrouvons son humour cinglant, il réfute ce qu’il y est écrit. Il décortique ses romans et ses personnages jusqu’à leur donner une vraie vie, leur propre parole. Prenant pour exemple l’un d’entre eux, il dit « Une fois de plus, ce n’est pas aux juifs que Zuckerman s’en prend, mais à ceux qui calomnient et dénigrent publiquement les juifs. »

Lors d’un discours prononcé pour ses 80 ans, il revient sur le travail des auteurs américains :
« Cette passion pour la spécificité des choses, pour l’hypnotique matérialité du monde dans lequel nous vivons, est fondamentalement au cœur de la tâche assignée à tous les romanciers américains… Trouver en mots la description la plus saisissante et la plus évocatrice de la dernière des petites choses qui font de l’Amérique ce qu’elle est… C’est dans sa fidélité scrupuleuse à l’avalanche de données précises constitutives d’une vie personnelle, dans sa physicalité, que le roman réaliste… trouve son implacable intimité ».

Déjà en 1961, Philip Roth affirmait que pour comprendre, décrire et rendre crédible la réalité américaine, l’auteur en a plus qu’il ne faut. « La surabondance de la matière défie les pauvres ressources de son imagination. La réalité dépasse sans cesse notre talent et la société produit tous les jours des personnages à rendre jaloux n’importe quel romancier. »

Dans cette compilation, nous trouvons également des conversations qu’il a eues avec des auteurs principalement européens et tchèques. Ni pour ni contre le communisme, Roth est surtout révulsé par les injustices. L’histoire de l’Amérique d’après-guerre, la chasse aux communistes vont inspirer Roth notamment lorsque son ami et professeur Bob Lowenstein se verra interdire d’exercer pour déviance politique et parce que trop dangereux pour qu’on le laisse exercer une quelconque autorité sur les jeunes. Il lui inspirera le personnage le plus important de J’ai épousé un communiste.

Après des vacances à Prague en 1972 où il rencontre les traducteurs de ses romans, il décide d’y retourner plusieurs années de suite. Il s’attachera à un groupe d’écrivains, journalistes et professeurs, tous persécutés par le régime totalitaire installé par les soviétiques en Tchécoslovaquie. C’est ainsi qu’il devient l’ami d’Ivan Klima et de Milan Kundera. Les conversations qu’il entretient avec ces auteurs nous apprennent autant sur Roth que sur leur propre écriture.

Je n’ai sûrement pas été exhaustive, j’ai omis de vous parler de ses conversations avec Primo Levi, et également des accusations dont Philip Roth se défend, notamment sur ce qui lui aurait inspiré La tache. Ce recueil de textes dont je vous conseille la lecture est une source inépuisable de connaissances sur l’écriture.

Babeth, 1er septembre 2019

Petit déjeuner avec Maylis de Kerangal

©Sébastien Perchec/Lire en Poche 2018

Lors du salon Lire en poche 2018, j’ai eu le plaisir d’animer un petit déjeuner littéraire avec Maylis de Kerangal, marraine du salon. L’auteure a tout de suite émis le vœu que les participantes (pas d’homme, comme trop souvent dans ce genre d’occasion !) se présentent. Outre l’intérêt qu’elles portent à l’écriture de ses romans, ces dames avaient toutes une raison bien personnelle de s’intéresser à l’un ou l’autre de ses ouvrages. On mettait là d’emblée le doigt sur la diversité des thématiques traitées par l’auteure. Réparer les vivants fut le roman le plus souvent cité.

Une des participantes aborde l’adaptation à l’écran de ce roman et demande à Maylis de Kerangal de quelle façon elle est intervenue dans la réalisation du film. En fait, comme Maylis nous l’explique, lorsqu’un écrivain signe un contrat de cessions avec l’éditeur, il cède à l’éditeur les droits d’exploitation de son texte, ce qui vaut pour le livre mais aussi pour une éventuelle adaptation au cinéma et au théâtre (sachant que l’auteur peut ne pas signer certaines cessions). De ce fait, on ne peut à la fois vendre les droits à un producteur et en même temps vouloir intervenir dans la réalisation à la place du réalisateur.Lire la suite »

Sieste littéraire et musicale

veronique-ovalde-soyez-imprudents-les-enfants-liseuses-de-bordeauxVendredi 9 décembre 2016 à 18h30 à la Machine à Musique, Marisa et Babeth vous liront des extraits du dernier roman de Véronique Ovaldé, Soyez imprudents les enfants, paru en août dernier chez Flammarion.

Atanasia Bartolome a 13 ans lorsqu’elle découvre la peinture de Roberto Diaz Uribe. Qui donc est ce mystérieux peintre qui la touche tant ? La jeune fille va partir à sa recherche, entamant une quête esthétique et personnelle sur ses origines, sur son histoire familiale. 

Afin de vivre pleinement ce moment de détente, il est préconisé d’apporter un tapis de sol, une couverture et un coussin.
Cette animation est gratuite et dure environ 45 minutes. Vous devez vous inscrire par mail dès à présent car les places sont limitées.
A bientôt !