Rencontre avec Delphine Bertholon pour La baronne perchée

Le 25 septembre dernier, comme nous vous l’avions annoncé, les Liseuses ont eu l’honneur de modérer la rencontre avec Delphine Bertholon grâce à l’invitation de la Médiathèque du Bouscat. Carine nous avait contactées cet été très enthousiaste à l’idée de faire découvrir aux lecteurs de la médiathèque cette auteure qu’elle suit depuis très longtemps et dont elle admire les qualités littéraires et humaines. Comme elle a pu nous le dire, Le soleil à mes pieds notamment, lui a laissé un souvenir de lecture percutant et bouleversant.

Cette rencontre que j’ai eu l’immense plaisir de modérer nous a permis d’aborder de très nombreux sujets, l’écriture de D. Bertholon en littérature générale mais également jeunesse et aussi en tant que scénariste, les apports croisés de ces différents genres dans son style et sa méthode de travail, ses goûts littéraires, ses sources d’inspiration, la façon dont on retrouve entre ses différents romans des échos d’un personnage à l’autre, d’une situation de vie à l’autre. Ce fût également l’occasion de parler bien sûr de son actualité littéraire avec la sortie cette année de La baronne perchée chez Buchet-Chastel que nous vous recommandons chaudement.

La baronne perchée ou l’histoire de Billie, 12 ans, bientôt 13, qui vit avec Léo, un père jeune, de plus en plus absent, qui boit trop et vit une paternité subie car marquée par la mort de sa compagne à la naissance de leur fille. Comme D. Bertholon le dit et nous amène à le ressentir, bien que Léo mette quelques jours à découvrir la disparition de sa fille, il ne lui manque pas grand-chose pour être un bon père. Au moment où nous faisons sa rencontre, il en est pourtant bien loin et Billie ne supportant plus cette distance entre eux fait une fugue en lui laissant sur son lit Le baron perché d’Italo Calvino pour tout indice. Billie met donc Léo au défi de la retrouver et d’exprimer son amour pour elle dans cette recherche qui va nécessiter qu’il essaie de se mettre à sa place. Au milieu de cette situation, un homme inconnu et mystérieux rôde ou attend quelque chose, un homme qui détient peut-être certaines clés.

Comme souvent dans les romans de D. Bertholon, il y a donc une part de mystère et surtout des conditions qui peuvent permettre de changer la vie d’une façon ou d’une autre si l’on s’en saisit. Cependant, vous l’aurez compris, les conditions, dans La baronne perchée, c’est avant tout Billie qui les crée et cela a été l’occasion d’échanger longuement avec l’auteure sur ses personnages qui sont souvent adolescents ou jeunes adultes (parfois l’un et l’autre lorsqu’on les rencontre à la fois adolescents puis jeunes adultes restant marqués par un évènement de leur adolescence). Ce fût ainsi passionnant d’échanger sur la pré-adolescence et l’adolescence qui sont pour D. Bertholon l’âge des possibles, celui auquel le regard que l’on porte sur le monde revêt une ambition, une justesse, un rapport à la vérité que les années émoussent ensuite. On pourrait parler de « fraîcheur » mais c’est bien plus que cela, et ses personnages nous permettent réellement de nous reconnecter avec un idéalisme dans le meilleur sens du terme, un idéalisme qui nous montre tout ce qui dans notre vie ne cesse de dépendre avant tout de nous. Comme elle a pu nous le dire, D. Bertholon croit dans les vertus de la vérité dans les liens familiaux, amicaux, amoureux ou plus précisément, elle est persuadée de la nocivité du mensonge et du silence dans les relations intimes. Ses personnages sont d’ailleurs souvent les otages ou les rescapés d’une dissimulation qui les a marqués au sceau d’un désalignement originel qui ne cesse de ricocher ensuite aux différentes étapes de leur vie.

Pour que vous puissiez vous faire une idée de ses romans si vous ne les avez pas encore découverts, je vous dirais qu’ils allient deux choses essentielles pour moi, style littéraire et plongée dans la vie des personnages que l’on suit pas à pas et dont on ausculte les désirs, les contradictions, les peurs, les souvenirs, des personnages jamais manichéens qui nous embarquent, dont on se souvient et qui nous inspirent au-delà du temps de lecture de ses romans. 

Un immense merci à Delphine Bertholon pour ce très beau moment de partage, authentique et convivial et à l’équipe de la médiathèque du Bouscat, Carine, Vincent, Mathilda et Jean-Luc pour leur accueil si chaleureux qui nous a conquises. On revient quand vous voulez ! 

France, octobre 2025

La baronne perchée, Delphine Bertholon, Buchet-Chastel, 2025

Chez Margot

Que manquait-il pour être heureux dans le secteur de Cambo, Ustaritz, Espelette, Larressore… ? En toute honnêteté et objectivité, pas grand-chose si ce n’est… une librairie !! Et Mélanie de la Librairie Chez Margot est venue y remédier en s’installant il y a deux ans à Cambo-les-Bains pour le plus grand plaisir des lecteurs invétérés ou occasionnels, autochtones ou curistes, qui ne pouvaient continuer à se contenter sans plus de perspectives des Maisons de la presse qui constituent certes de petits phares dans la nuit pour lecteurs en déshérence mais qui ne sauraient combler plus que des besoins ponctuels. La librairie Chez Margot vient donc répondre à un réel besoin sur ce petit bout de territoire très attractif mais auquel il manquait un poumon de littérature pour respirer l’air des montagnes à plein !

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! Rentrée littéraire ! : La récréation est finie de Dario FERRARI

La récréation est finie sortira le 21 août aux Editions du sous-sol. Il s’agit du deuxième roman de l’auteur, encore inconnu en France car c’est son premier roman traduit en français. La récréation est finie ou l’histoire de Marcello qui se lance un peu par hasard dans la rédaction d’une thèse de doctorat sur Tito Sella, un terroriste-écrivain des années de plomb. Marcello le dit lui-même :

Dans ma vie, je n’ai jamais pris aucune décision importante de manière consciente. Ce qui a provoqué mes actions, c’est toujours une combinaison de hasard, d’inertie et d’abandon inconditionnel à des circonstances extérieures. Il en est allé de même avec mon doctorat.

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« Prendre soin au milieu du chaos : l’invention des possibles » Festival Etonnants voyageurs

Autour de la table ronde : Jean HEGLAND, Rodrigo BLANCO CALDERON, Yara EL-GHADBAN

Parmi les personnages principaux des derniers romans de ces trois auteurs : la forêt (Jean HEGLAND, Le temps d’après), des flamants roses (Yara EL-GHADBAN, La danse des flamants roses), des chiens abandonnés (Rodrigo BLANCO CALDERON, De l’amour des chiens).

Ils se déroulent dans des contextes d’atteinte de bout du monde, d’un monde contraint à se réinventer, contextes post-apocalyptiques ou presque même si l’on ne sait pas toujours en quoi a consisté l’Apocalypse. Au Vénézuela dont est natif R. Blanco Calderon, ce sont 9 millions de compatriotes qui ont quitté le pays rappelle-t-il, avec pour conséquence l’abandon d’un nombre considérable d’animaux domestiques et le projet d’ouvrir une improbable fondation pour les prendre en charge. L’occasion pour R. Blanco Calderon de faire référence à la magnifique citation d’une poétesse uruguayenne dont je n’ai malheureusement pas réussi à prendre le nom à la volée :

Puisque tu n’es à l’abri de rien, essaie toi-même de sauver quelque chose.

C’est bien de cela dont il s’agit dans ces trois romans, de sauver ce qui peut l’être, et plus encore de nouer des liens jusque-là inconnus, jamais expérimentés, avec la forêt devenue unique ressource et rempart contre les dangers, avec le monde animal, avec le vivant de manière plus générale, et avec les autres hommes dans un cadre d’existence intégralement transformé. Y. El-Ghadban voulait ainsi faire du territoire palestinien le lieu du début d’une autre histoire, rappelant au passage la force inépuisable de l’espoir à ses yeux :

Si l’espoir n’était pas si puissant, il n’y aurait pas tant de tentatives de le tuer.

Comme elle le dit, ce n’est rien de moins qu’une utopie qu’il s’agissait pour elle d’écrire.

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