Paul Lynch, prophète du festival des Etonnants Voyageurs

Il était impossible cette année de repartir du festival Etonnants Voyageurs de Saint-Malo sans connaître le nom de Paul Lynch ! L’écrivain irlandais était présent dans pas moins de cinq rencontres aux formats très variés, allant du grand débat inaugural à une séance plus intimiste de lectures à voix haute d’extraits de ses cinq romans.

Pour ceux qui ne le connaîtraient pas, Paul Lynch est devenu une icône dans son pays depuis que son cinquième roman, Prophet song, a été récompensé du prestigieux Booker Prize en 2023. Ce livre, qui s’est vendu à plus de 500 000 exemplaires au Royaume-Uni, a également été traduit dans plus de trente langues. Sa version française est parue sous le titre Le chant du prophète chez Albin Michel en début d’année.

Personnellement, je me souviens de l’excitation ressentie dès la lecture des premières lignes de ce roman. La joie du lecteur qui découvre une écriture superbe, qui pressent qu’il a ouvert un livre qu’il va prendre énormément de plaisir à lire.

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Dès que sa bouche fut pleine, de Juliette Oury

Aimeriez-vous vivre dans un monde où le sexe aurait pris le rôle social de la nourriture ? Où il serait naturel de baiser 3 fois par jour, avec conjoint, collègues ou amis. Où manger ferait partie de la sphère intime. C’est la dystopie que Juliette Oury a imaginée dans son roman Dès que sa bouche fut pleine. Nous suivons la vie de Laetitia et Bertrand, leur couple, les soirées où l’on se retrouve pour se mélanger et non pour un bon repas entre amis. Une soirée sans chichi, à la bonne banquette ! Il y a aussi la vie professionnelle : point de salle café mais une salle détente avec distributeurs de capotes. Comme la nourriture est tabou, on en parle beaucoup. Notamment des réseaux de cuisine clandestine, et de l’arrestation de madame Reine Claude. Pour se nourrir, on mange des barres sans arômes.

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Les soeurs de Blackwater

Les soeurs Blackwater de Alyson Hagy

Le contexte historique du récit pourrait se définir comme une dystopie survivaliste. Toutefois, dans mon imagination, l’histoire se situe après une guerre, celle de Sécession par exemple. La situation d’un pays après une telle rupture historique provoque forcément un contexte survivaliste dans lequel s’inscrivent les épidémies que la narratrice évoque.

Dans ce décor, elle brosse le portrait de deux sœurs, dont l’une était guérisseuse et morte au moment du récit. Son souvenir hante la seconde. Celle-ci a un don : elle sait lire et écrire. Ses contemporains l’envient car il n’y a plus grand monde sachant rédiger de belles lettres comme elle. De fait, elle met cette capacité à disposition de ceux qui en ont besoin : un homme lui demande une lettre résumant les étapes de sa vie. Il s’agit pour lui qu’elle aille demander pardon en son nom, dans un lieu prévu à cet effet. Après beaucoup d’hésitation, elle accepte et son périple se transforme en une quête initiatique où elle se découvre et se réconcilie avec elle-même.

C’est une très belle histoire de femme un peu sorcière, un peu chamane qui pense connaître son monde et elle-même. Cette femme n’a pas de nom et ne fait que survivre plutôt que vivre. Accepter de porter la parole d’une personne lui permet de se révéler elle-même et de trouver la force d’aimer. Un très beau texte !

Bérengère, 15 avril 2020

C’est le coeur qui lâche en dernier

C’est le cœur qui lâche en dernier, de Margaret Atwood, est d’une ironie mordante. Riche en rebondissements aussi loufoques que glaçants, inventif, ce roman, qui est le premier que je lis de Margaret Atwood, interroge la société d’aujourd’hui et ses dérives.

Stan et Charmaine sont un jeune couple subissant de plein fouet la crise économique majeure qui frappe les Etats-Unis. Ils (sur)vivent de petits boulots ne leur permettant plus de payer un loyer, d’ailleurs ils vivent dans leur voiture. A la merci de la violence de la rue, ils développent des stratégies de survie, comme celle de changer de places tous les jours pour ne pas se faire repérer et risquer une bagarre dont ils ne sortiraient pas indemnes. Car Stan et Charmaine ne sont pas des super héros. Ce sont des jeunes gens ordinaires et tendres, n’aspirant qu’à mener une vie paisible.Lire la suite »