La liste à la mère Noël… des Liseuses

Le choix de Véronique s’est porté sur Le Fou de Dieu au bout du monde de Javier Cercas.

C’est un livre que je n’ai pas encore lu mais qui me brûle les yeux depuis quelques semaines. L’athée Xavier Cerclas est invité par le Vatican à accompagner le pape François dans un voyage lointain. Sans doute contre sa propre attente, l’auteur accepte, bien résolu à obtenir la réponse à une question fondamentale que toutes les civilisations se sont posée mais avant tout sa propre mère : « Verrait-elle son mari après sa mort ?« . En d’autres termes : « Y-a-t-il une vie après la mort » ? Question bizarre pour quelqu’un qui fait profession d’athéisme et d’anti cléricalisme mais peut être pas finalement d’un athée inquiet. 

C’est cette inquiétude qui bien sûr m’intéresse. J’espère donc un récit dérangeant, irrévérencieux mais non dépourvu d’humour et de gravité. 

Les envies de Zazzz

Amatrice de science fiction, j’ai remarqué cette année la sortie du film « Chien 51 » de Cédric Jimenez, qui relate une enquête policière au sein d’un univers dystopique (non je ne veux pas en savoir plus pour le moment, mince c’est partout sur le net !) avec toute une kyrielle d’acteur.ice.s époustouflant.e.s. dont Gilles Lellouche et Adèle Exarchopoulos.

Peut-être un peu « vieux jeu », et malgré la tentation, je me suis refusée à le visionner tant que je n’aurai pas lu le roman, éponyme, de Laurent Gaudé, qui a évidemment servi de base au film. Je n’aime pas qu’on me « vole » mon imaginaire, même si je peux dans un second temps en apprécier les interprétations. 

Il se trouve que je ne me suis pas encore plongée dans l’oeuvre de Gaudé, eh non, pas eu le temps, l’occasion, tant de livres à lire, poney sur glace etc., pourtant ça me démange de plus en plus, et ce n’est pas la libraire de l’Encre blanche, qui est fan, qui m’en dissuadera, bien au contraire. Alors voici la liste des livres que je souhaite qu’on m’offre pour ce Noël (Mère Noël, prends en bonne note, j’ai été très sage, je le jure !) :

Le Soleil des Scorta (prix Goncourt 2004), pour commencer par un « classique »

Chien 51, sorti en 2022

Zem (chouette, c’est la suite de Chien 51, parue en 2025 !)

Après, et après seulement, j’aurai le droit de regarder le film, y’a des règles mille sabords !

Hâte de découvrir tout ça, jingle bells les ami.e.s !

France n’a pas pu attendre pour dévorer A retardement de Franck THILLIEZ

Retard dans le choix d’un cadeau de Noël, intention d’opter pour un livre mais quoi ? Dans ces moments d’atermoiements comme dans les moments d’ailleurs où on ne se sent pas très en forme, besoin de réconfort, de quelque chose permettant de réellement décrocher du quotidien, allez savoir pourquoi, bizarrement, le polar est synonyme de bon choix ! Doux et réconfortant comme un polar… de fait un polar n’est la plupart du temps ni l’un ni l’autre mais procure paradoxalement cet effet parce qu’on va aller au bout d’une aventure avec des personnages aux prises avec les pires monstruosités et développer assez rapidement de l’empathie pour eux. Ils affrontent ce que précisément on ne se sentirait pas du tout en capacité d’affronter au moment où le moral fléchit un peu. Cathartique en un mot.

C’est dans ce cadre que je vous recommande de ne pas hésiter à choisir A retardement, le dernier roman de F. Thilliez qui plonge dans les arcanes de la psychiatrie lourde et aussi des effets des pathologies psychiatriques les plus sévères sur les malades qui les subissent.

Le roman démarre sur la question de l’irresponsabilité de certaines personnes qui ont commis les crimes les plus atroces. Difficile à entendre pour un flic qui trouve indéfendable au début l’expertise de la psychiatre mais ça c’est au début car ensuite les choses deviennent bien moins manichéennes (un grand merci à l’auteur d’avoir su donner à voir la complexité de ces questions !) et la mécanique véritablement infernale de l’intrigue se met en place.

Personnages intéressants, intrigue abominablement tortueuse et maîtrisée, savourez, vous n’avez qu’à vous laisser embarquer !  

Eric fait durer l’attente pour découvrir Danser avec le vent d’Emmanuel Lepage

En 1772, un Français, Yves de Kerguelen, découvre dans les mers australes un archipel où abondent manchots et autres éléphants de mer mais où des conditions climatiques extrêmes ont interdit à l’homme de s’établir. Ces îles, qui portent depuis son nom, demeurent vierges de tout peuplement humain permanent. Mais la France y entretient une base, principalement scientifique, ravitaillée 4 fois par an par un bâtiment de la marine nationale, le Marion Dufresne.

La semaine dernière, j’ai appris en écoutant La Terre au carré de Mathieu Vidard sur France Inter que l’auteur de bande dessinées Emmanuel Lepage sortait aux éditions Futuropolis un nouveau livre, récit graphique d’un récent séjour dans ces îles, Danser avec le vent. Fan d’Emmanuel Lepage dont j’apprécie le graphisme et la sensibilité, conquis par l’interview, j’ai immédiatement commandé ce roman graphique et je vous le recommande chaudement pour ces fêtes de Noël !

Parce que je suis curieux de savoir pourquoi il a choisi de retourner, cette fois en immersion pour plusieurs semaines, aux Kerguelen, lieu où il a déjà fait un court passage en 2011,

Parce que le titre de ce nouveau livre, Danser avec le vent, convoque le vent, omniprésent aux iles Kerguelen, qui y rend la vie si difficile,

Parce que ce titre convoque également la danse, qui permet aux quelques scientifiques qui sont en mission dans cet archipel de créer du lien, faire la fête, tenir bon sur ces terres désertiques du bout du monde,

Parce que j’ai hâte de découvrir comment Emmanuel Lepage dessine le vent,

Parce que c’est un témoignage important des transformations que les scientifiques observent déjà dans cet avant-poste du réchauffement climatique,

Parce que c’est un livre qui parle du vivant sauvage,

Parce que c’est un livre qui parle de joie !

Les Liseuses de Bordeaux vous souhaitent de belles lectures et de très belles fêtes de fin d’année.

Comme en amour, d’Alice Ferney

Le dernier roman d’Alice Ferney, Comme en amour forme une sorte de diptyque avec La Conversation amoureuse paru en 2000, pourtant ce « comme » s’il introduit l’analogie, met en relief la différence au travers de deux histoires de sentiment qui finissent par s’entremêler étroitement tout en se distinguant complètement par leur différence de nature.

L’auteur explore ici la philia et non l’éros où les protagonistes ont le corps en commun, au contraire de la philia où l’amour sans le corps, c’est-à-dire l’amitié, met en jeu bien d’autres « communautés ». L’accord des goûts, ici celui de la littérature, mais pas des loisirs partagés, « l’un et l’autre pensant que l’intimité a des limites », l’entente des sensibilités, « ce je ne sais quoi » qui fait de l’amitié « ce coup de foudre existentiel » dont parle Louis Guilloux à propos de son amitié avec Camus.

Les personnages qui construisent ce roman sont au nombre de trois.

D’abord il y a Marianne Villette, créatrice à succès de sacs à main de luxe. Elle est mariée et a 3 enfants. Puis il y a Cyril Blot, photographe professionnel dans le monde de la mode et de l’art en général. Il est célibataire sans enfants. Ces deux-là se rencontrent lors d’un rendez-vous professionnel chez Marianne. Enfin apparait un peu plus tard Julia Magre, le coup de foudre et grand amour de Cyril, celle qui introduira, à son corps défendant, le déséquilibre dans la relation entre Marianne et Cyril.

 Comme dans La Conversation amoureuse, Alice Ferney fait dialoguer inlassablement et nécessairement ses personnages. Les mots qui remplacent les corps, dans leur flux ou dans leur silence construisent puis déconstruisent la relation que l’auteur balise en courts chapitres par des verbes énonçant toutes les étapes de l’amitié et sa progression en un mouvement ascendant puis descendant. Entre Se rencontrer et Se perdre de vue, qui ouvrent et ferment la narration, tout ce qui vient nourrir ou entamer la relation est abordé. Comme toujours Alice Ferney a chaussé ses loupes pour transcrire dans son écriture d’entomologiste tous les sentiments et ressentiments de ses personnages.

Ce pacte d’amitié, sans contrat oral ou écrit est cependant soumis à condition s’il veut s’accomplir dans la durée. La première condition serait l’équilibre, l’égalité dans la relation. Dans Kolkhoze, Emmanuel Carrère parle de « la répugnante distance entre l’admiré et l’admirateur » impensable dans l’amitié où l’estime réciproque est la donnée fondamentale.

Une seconde condition : le respect de la confidentialité. « Rien ne détruit la confiance comme le tourniquet de la parole à l’intérieur d’un groupe restreint » et lorsque ce « pacte naturel de silence » est rompu, l’amitié est ébranlée et trahie. Mais l’amitié n’est pas une forteresse bien gardée, elle peut être assiégée par un tiers pour son propre intérêt, et cet air pur est alors vicié par un souffle extérieur. Alors que pour Marianne et Cyril « la barrière entre les sexes s’abolissait dans l’ivresse de la confession », Alice Ferney les fait finalement entrer dans la guerre des sexes car « à l’amitié s’ajoutait et peu à peu s’opposait la solidarité ».  L’amour va bientôt instrumentaliser l’amitié et la solidarité entre femmes va prévaloir sur la neutralité. Cyril pour qui « la famille, c’est l’amour qui en voulant durer se tire une balle dans le pied » refuse l’enfant que porte Julia pour des raisons purement égoïstes dont Marianne est « le témoin indiscret ».

Alice Ferney pose la question : « Reste- t-on ami avec quelqu’un qui se tient mal ? ».

La question de l’estime, toujours.

Véronique, novembre 2025

Alice Ferney, Comme en amour, 2025 chez Actes sud

Rencontre avec Sandra Larribe pour La vie tumultueuse d’Hélène de Troie

Suite à la lecture d’HÉLÈNE – La vie tumultueuse d’Hélène de Troie, de Sandra Larribe, et à l’article de Véronique, paru dernièrement dans le blog des Liseuses, Véronique et Zazzz ont eu la curiosité d’en apprendre davantage sur cette talentueuse écrivaine nouvellement éditée, son roman, son parcours…. Nous vous partageons ici des extraits de cet échange chaleureux et très riche, en espérant que vous aurez envie, vous aussi, de voyager dans cet univers mythologique fascinant, revisité à la sauce moderne et féministe…

ZAZZZ :  Bonjour Sandra. Avant d’aller plus avant dans la discussion autour d’HÉLÈNE – La vie tumultueuse d’Hélène de Troie, paru dernièrement aux Éditions Complicités, qui est d’ailleurs un premier livre, pourriez-vous vous présenter en quelques mots : qui est Sandra Larribe l’écrivaine, et, comment vous est venu le désir d’écrire ?

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Rencontre avec les éditions de la Cerise

Si la flânerie est une promenade sans but, elle n’en recèle pas moins la possibilité d’une découverte, celle par exemple que j’ai faite un dimanche d’hiver, rue de la Rousselle, au numéro 54, au cœur du vieux Bordeaux.  

J’aurais pu une fois encore passer sans rien voir car la modestie de la vitrine et de son installation n’attire pas a priori un chaland photophile et ça tombe bien, car les livres ici exposés s’adressent à des lecteurs avertis qui ne s’arrêtent pas là tout à fait par hasard. En sus, on vous fait une promesse gourmande avec le nom du lieu : La Cerise. Mais comme on peut le deviner, c’est toute une histoire qui a conduit à la maturation du fruit, une histoire de 22 ans.

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